Mercredi 19 Avril 2023

L'avis écrit concernant la proposition de résolution en vue d'une gestion plus ciblée de la violence et du harcèlement sur le rail et dans les infrastructures ferroviaires donné par le Syndicat METISP-Protect Cheminots

Mesdames, Messieurs les membres de la Commission de la Mobilité, des Entreprises publiques et des Institutions fédérales,

 

Concerne : demande d’avis écrit (DOC 55 2809/001)

 

Par courriel du 20 mars 2023, vous m’avez demandé un avis écrit concernant la proposition de résolution 2809 (M. Tomas Roggeman, Mme Frieda Gijbels, M. Wouter Raskin) en vue d'une gestion plus ciblée de la violence et du harcèlement sur le rail et dans les infrastructures ferroviaires.

 

Le Syndicat que je représente est honoré de cette demande et vous remercie de votre confiance.

 

Nous avons pris bonne connaissance du travail accompli et de la proposition émise.

 

Nous sommes heureux de constater qu’elle rencontre plusieurs problématiques auxquelles sont confrontés les agents de Securail et pourrait promettre  une belle avancée en la matière.

 

Une question primordiale - et à notre sens préalable à toute avancée - ne nous apparait toutefois pas avoir été prise en compte à suffisance.

 

 Il s’agit de la nécessité de clarifier le statut des agents de Securail.

 

Lors de la réunion de votre commission du 08 février 2022, les interventions de Monsieur le député Laaouej ont pourtant visé ce point : qu’attend-on d’eux ? De la prévention ? De l’intervention ? De quels moyens adéquats disposent-ils pour intervenir dans les limites de leurs prérogatives et pour assurer la protection de leur intégrité ?

 

Le statut actuel des agents de Securail les assimile à des agents de gardiennage, de sécurité privée (compte tenu de l’application de la loi du 2 octobre 2017 réglementant la sécurité privée et particulière) et non à des agents investis de missions de prévention et de sécurité publique.

 

Or ce statut ne correspond pas à la réalité à laquelle ils sont confrontés sur le terrain.

 

Sur le terrain, les missions de ces agents sont très éloignées de celles d’agents de sécurité privée. Elles comportent de nombreux risques et les confrontent, fréquemment, en première ligne, à des comportements dangereux, menaçants, pouvant porter atteinte à leur intégrité physique. Les développements de la proposition de résolution en attestent à suffisance.

 

Ils ne disposent pourtant pas de moyens à la hauteur de leurs missions, qu’il s’agisse d’assurer adéquatement des interventions de nature plus répressive ou de garantir le respect de leur intégrité, de leur sécurité. Ces moyens doivent donc couvrir tant l’accomplissement de leurs missions de répression, qu’assurer leur protection.

 

Déterminer ces moyens de manière adéquate ne pourra se faire qu’en clarifiant et adaptant leur statut.

 


Autrement dit, les demandes au Gouvernement fédéral visées dans la proposition de résolution ne seront d’une réelle utilité que si le rôle, le statut de ces agents est clarifié au préalable.


Actuellement, il ne peut qu’être constaté que la réalité vécue par ces agents sur le terrain n’est plus rencontrée e ne permet plus d’être couverte par le cadre limité de leur statut.


Leur mission de répression est, ainsi, indéniable et devient même indispensable avec le temps.


Il est, par conséquent, primordial de leur octroyer des moyens de défense adéquats (tel des matraques télescopiques, par exemple, actuellement refusées en raison du cadre de la loi sur la sécurité privée de 2017). A cet égard, si l’utilisation de caméras corporelles (point 8 des demandes) est intéressante, notamment en termes de preuve du déroulé de certains faits et jouera peut-être un rôle dissuasif, elle ne protégera pas les agents en mission. Or, ils ressentent un besoin crucial de se sentir en sécurité.


En effet, la plupart des interventions portent sur des individus mieux « armés » (la fréquence de l’exhibition de couteaux est alarmante) que les agents Securail, qui doivent pourtant intervenir en première ligne, avant l’arrivée de la police (qui n’arrive majoritairement qu’à la demande de l’agent Securail) et qui ne disposent pas de moyens de défense adéquats (tel le « pepper spray » qui ne présente aucune efficacité, encore moins au vu des conditions dans lesquelles il doit être utilisé).

 

Sur le terrain, il nous semble également primordial que les agents ne soient plus identifiés à des agents de sécurité privée par le public. Le port de l’insigne « Vigilis » confirme au public que les agents de Securail ne sont « que » des agents de sécurité privée et lui donne confirmation qu’en cas d’intervention, leurs pouvoirs seront limités (à nouveau, il est actuellement refusé de supprimer le port de cet insigne en raison de l’application de la loi sur la sécurité privée de 2017).

 

Si le port de cet insigne peut sembler une considération de moindre importance, il n’est en rien dans la pratique des agents. C’est quotidiennement que cet affichage leur pose problème car il véhicule le message selon lequel les agents Securail ne disposent d’aucuns droits ou pouvoirs répressifs.

 


Pour illustrer cet impact, rien de plus parlant qu’un exemple. Lorsqu’un agent Securail place quelqu’un en rétention ou quand il doit lui demander sa carte d’identité, une grande majorité des personnes interpelées ne témoigne aucune coopération, considérant qu’il ne s’agit pas de prérogatives leur revenant. Cela déclenche souvent l’existence de tensions menant à de l’agression physique.


Les agents Securail ressentent cet insigne comme un réel handicap au quotidien, les empêchant de mener à bien leurs missions et les exposant quotidiennement à un danger qui pourrait aisément être évité.


Enfin, la question des compétences des agents Securail doit également être abordée. Ils ne peuvent, par exemple, fouiller complètement un bagage lors de leurs rétentions. Dans le même ordre d’idées, même en cas de flagrant délit de vol, un agent Securail doit réunir l’identité de 5 témoins pour pouvoir retenir l’auteur du flagrant délit.

 

Leurs compétences doivent, par conséquent, indubitablement, être élargies.

 

La refonte du statut est, par conséquent, imparable afin de faire évoluer un service dont le statut est devenu obsolète face à l’évolution de la société.

 

Cette refonte est urgente vu l’importante baisse de motivation que crée cette inadéquation.

 

Pour le surplus, les demandes peuvent potentiellement représenter de réelles avancées positives et importantes en ce domaine mais restent trop théoriques à nos yeux pour rencontrer concrètement le besoin croissant de sécurité et de légitimité ressenti par les agents sur le terrain.

 

Ainsi tant que le statut et les missions des agents ne seront pas clarifiés, les quatre premières demandes visées par la proposition ne pourront que difficilement se traduire dans la pratique.

 

Les demandes 5 à 7, visant l’amélioration des échanges et de la collaboration entre les services de police et Securail emportent bien entendu l’entière approbation de notre syndicat.

 

Il en va de même de la demande n°8 concernant les caméras corporelles, sous réserve de l’observation susvisée concernant son impact limité en termes de sentiment de sécurité des agents.

 

La demande n°9 concernant les engagements supplémentaires emporte également, bien entendu, notre plein et entier soutien.

 

Vous remerciant d’avance pour le temps que vous aurez consacré à la présente, espérant qu’elle vous sera utile et restant à votre entière disposition, nous vous prions d’agréer, Mesdames, Messieurs les membres de la Commission de la Mobilité, des Entreprises publiques et des Institutions fédérales, nos sentiments distingués.

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